Plongée dans le monde texturé et poétique de la minéralogie avec Kim au Musée national d’histoire naturelle

Conservation, recherche et égalité sont au cœur du travail de Kim Totaro au MNHN.

Elle est l’une des seules géologues luxembourgeoises spécialisées dans les minéraux un oiseau rare !

Elle combine savamment la préservation de la collection luxembourgeoise de minéraux avec des recherches novatrices qui rayonnent à l'échelle internationale. Rencontrez Kim Totaro, Assistante de Conservation Géologie-Minéralogie au Musée national d’histoire naturelle (MNHN).

CONSERVATION, RECHERCHE et ÉGALITÉ rythment son travail dans le domaine dynamique de la minéralogie.

 

Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/David Laurent

 

Kim décrit carrément son travail actuel au musée comme le « poste de ses rêves » ! C'est dire ! Il faut savoir qu’au Luxembourg, les opportunités en géologie sont aussi rares qu'un trésor enfoui. Si des géologues se bousculent en France et en Australie, ils sont en revanche plus rares chez nous - et encore bien plus en minéralogie. Kim a la chance de côtoyer au quotidien un monde de minéraux mystérieux et sous-estimés du Luxembourg et des quatre coins du globe. Travailler pour le service public, c’est aussi ça : développer des expertises rares et se consacrer à la recherche et au développement d’un domaine important. Kim l’a découvert dès ses premiers stages au Musée national d’histoire naturelle au cours de ses études.

 

Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent

 

Simon Philippo, le visionnaire en minéralogie qui a d’ailleurs été son guide et son mentor dès ses débuts, est devenu aujourd’hui son allié intellectuel. Leurs esprits se croisent, se complètent et s'élèvent ensemble. Des liens qui se sont tissés au fil des ans, depuis les bancs de l'université jusqu'à la réalité fascinante du musée.

 

CONSERVATION
L'art de chouchouter les collections du musée

Classer et organiser les minéraux, les polir et les soigner minutieusement, puis les encoder dans la base de données en fonction de leurs catégories et de leurs caractéristiques : voilà les bases du travail de conservation. Certains minéraux sont plus sensibles à la lumière, à la température ou à l'humidité : rien ne peut être laissé au hasard. Au-delà des tâches de nettoyage et de classement, qui demandent méthode et méticulosité, le travail s’appuie sur les vastes connaissances de Kim, qui sait reconnaître et identifier les origines des minéraux et les classer « en fonction de leur chimie ».

« On a les phosphates, les silicates, les carbonates, et différentes sous-classes, précise-t-elle. Connaître l’origine des minéraux est essentiel. Si on ne la connaît pas, on ne peut rien faire. C'est comme avoir un vin sans millésime. »

 

Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent
Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent

 

Un travail technique exigeant ? Des tâches requérant la rigueur du plus méticuleux employé de laboratoire ? Certes ! Mais il faut aussi tout autant avoir l'œil du poète et l'amour des formes surprenantes que peuvent arborer les minéraux.

 

« Pour moi, ce travail, c’est accéder chaque jour à la beauté et à la poésie de la nature à travers les minéraux », poursuit-elle. « Ce sont des objets bruts, bataillés par la terre qui les a créés. Je dis toujours que ce sont les fleurs de la terre. Ils sont sous terre pendant des millions d'années, et peu à peu une combinaison d’éléments chimiques se mettent ensemble pour leur donner un aspect sublime, créant souvent des formes géométriques parfaites et des couleurs fascinantes. » Au musée, ils sont exposés dans une vingtaine de vitrines dans la « salle des Trésors », dont le contenu change régulièrement, en fonction de thématiques choisies par Kim et son mentor.

 

Acquérir de nouveaux minéraux est également une aventure passionnante pour Kim. Des donations de collections entières peuvent arriver un matin et lancer un fascinant processus de tri pendant des semaines, voire des mois. « En 2020, une collection du Brésil nous a été léguée, que nous avons longuement triée et enregistrée, explique-t-elle. Il arrive aussi que nous achetions des minéraux spéciaux, dont la forme est rare ou dont la composition chimique nous intéresse pour bonifier notre collection. »

 

RECHERCHE
Édifier un savoir unique au pays et dans le monde

Kim Totaro et Simon Philippo sont de grands géologues spécialistes des minéraux luxembourgeois, dont le musée possède une collection qui inclut « des quartz, des calcites et des hématites, qui viennent du sud du pays ». Au nord du Luxembourg se trouvent plutôt « des minéralisations de cuivre qui sont issues d’anciennes mines de cuivre exploitées sur notre territoire jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale », précise la chercheuse.

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« À travers les minéraux se raconte évidemment une certaine histoire sociale et économique du pays, continue-t-elle. De par nos collections, on plonge dans le passé de l'exploitation du fer dans le Minett, au sud : le pays des Terres rouges, ou au cœur de décennies d'exploitation de l'antimoine et d'autres minéraux comme le plomb et le zinc sur d'autres parties du territoire luxembourgeois. Mon collègue Simon a même découvert un nouveau minéral, très rare, qui contient de l'argent, du cuivre, du plomb, du bismuth et du sélénium... un assemblage atypique, et surtout unique. On l’a appelé la Luxembourgite.
Cette Luxembourgite est véritablement une trouvaille exceptionnelle. Il est rare de découvrir de nouveaux minéraux, et le fait que cela ait été déniché sur notre sol national est une chance inouïe. La probabilité d'une telle découverte est extrêmement faible. »

 

Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent

 

Le travail de Kim n’est donc pas strictement celui d’une conservatrice, mais bien celui d’une chercheuse qui se soucie de faire avancer les connaissances minéralogiques à l’échelle nationale – le musée collabore à ce titre avec l’Université du Luxembourg sur ce chantier permanent. Le Luxembourg est d’ailleurs de plus en plus soucieux de classifier son patrimoine géologique, minéralogique et paléontologique. Aujourd’hui, lorsque le gouvernement autorise une fouille sur une partie du territoire, il invite les minéralogues au même titre que les archéologues à venir ausculter la terre. « Aller sur le terrain pour échantillonner de nouveaux minéraux est un travail très intéressant, se réjouit Kim. On le fait aussi en fonction de certaines thématiques, par exemple, en ce moment, nous répertorions les minéraux des fleuves et rivières du pays, en collaboration avec un autre géologue. »

 

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Les horizons de la recherche s'étendent bien au-delà de nos frontières, tissant des liens internationaux : l'équipe du MNHN est régulièrement appelée à collaborer avec des esprits scientifiques allemands, belges, voire même brésiliens et bien plus divers encore, afin d'étudier ensemble des spécimens uniques.

 

ÉGALITÉ
Être une femme scientifique malgré l'adversité

Sans surprise, la minéralogie est une discipline dominée par les hommes. Kim est l’une des rares femmes à s’y être frayé un chemin. « Mais, soyons positifs ; il y a une augmentation constante du nombre de femmes scientifiques ces dernières années, souligne-t-elle. Je suis fière d’en faire partie. Même si, au fil de mon parcours universitaire, on a parfois tenté de me dissuader de poursuivre des études scientifiques. Je dois tout de même être honnête, j’ai aussi reçu beaucoup d’encouragements. »

L’apport féminin aux sciences est majeur, selon Kim, à travers différentes façons de penser et une expérience plurielle de la recherche.

« Toute diversité est la bienvenue en science, pour varier les perspectives. C'est difficile de déterminer ce qui est féminin ou masculin dans une approche scientifique, mais à mon échelle toute personnelle, j'ai l'impression que ma sensibilité féminine s'exprime dans mon métier à travers une plus grande ouverture à la beauté des échantillons. Là où mes professeurs d'université ne voyaient que des considérations scientifiques, je vois aussi une valeur esthétique. Et l'esthétisme fait partie de la science, indéniablement ! »

 

Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent
Géologie et Minéraux du Luxembourg : Découvrez le travail de Kim Totaro au MNHN
©CGPO/ David Laurent

 

Aux jeunes filles éprises de science, Kim conseille de ne pas porter attention aux commentaires des personnes qui tentent de les dissuader, mais surtout « de maintenir le cap sur ses objectifs ».

« En géologie-minéralogie, je dirais qu’il faut aussi rapidement trouver le thème qui vous passionne. Il y a à peu près 30 différentes spécialisations possibles. Votre parcours sera plus cohérent, avec un accès plus direct au monde professionnel, si vous rétrécissez d'abord le spectre en choisissant une expertise plus pointue. »

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